mardi 10 mars 2015

Rapport 2014/2015 : Amnesty International dénonce la réponse « scandaleuse et inopérante » de la communauté internationale aux conflits et en appel à un changement fondamental de méthode



Le 25 février dernier, dans la salle de conférence de Pacific Hôtel de Ouagadougou, Amnesty International Burkina Faso procédait au lancement du rapport annuel d’Amnesty International sur la situation des droits humains dans le monde devant une quarantaine de journalistes des médias burkinabé. Une dizaine de partenaires et une vingtaine de membres et sympathisants sont venus également marquer leur solidarité et rappeler la nécessité d’un engagement solidaire et continu en faveur des droits humains.

Pour peu que l’on puisse dire, les analyses et les révélations faites dans le rapport confirment une crise d’une ampleur considérable en matière de droits humains. En effet, les conflits armés marqués parfois par une sauvagerie des groupes islamistes armés, la répression contre les dissidents, l’impunité des tortionnaires et responsables militaires et politiques… ont causé et continuent de causer des souffrances inouïes à des millions d’individus dans toutes les différentes parties du monde. A titre illustratif, des centaines de milliers de civils sont tués ou blessés dans des conflits au Nigéria, au Pakistan…, tandis que des nettoyages ethniques se déroulent en République Centrafricaine, en Irak… des violences sexuelles dans les conflits en RDC, en Syrie. Des millions de personnes contraintes de fuir les violences sont privées de refuge, de protection et d’aide, et abandonnées à la mort.

Parmi ce spectre macabre et révoltant, des indicateurs spécifiques de progrès ont tout de même été enregistrés. Il s’agit par exemple de l’entrée en vigueur du traité sur le commerce des armes qui offre un cadre de limitation des transferts internationaux d’armes et de munitions ; du déploiement d’une force onusienne de maintien de la paix en République Centrafricaine ; des confirmations de charge et des condamnations par la CPI et des cours régionales des droits humains telle que la cour africaine des droits de l’homme et des peuple…

Amnesty International reste cependant préoccupée par les jours sombres qu’annoncent les réponses inefficaces au besoin de protection des civils dans les conflits d’une part, et la menace que constitue le pouvoir croissant des groupes armés d’autre part. Pour cause, Amnesty International a constaté d’abord que les intérêts particuliers des Etats l’emportent sur les besoins des victimes d’atteintes flagrantes aux droits humains, entrainant des livraisons d’armes à des pays tel que la Syrie, où elles servent  à commettre de graves violations de droits humains. En sus, l’utilisation du droit de véto paralyse scandaleusement le Conseil de sécurité des Nations Unies dans sa capacité à protéger les civils lorsque les intérêts des cinq membres permanents sont en jeu. Ce fut le cas en Syrie, à Gaza et en Ukraine où le Conseil de sécurité n’a pas été à mesure d’empêcher que des crimes et des atrocités soient commis contre des civils.

Ensuite, la lutte aveugle contre les combattants islamistes armés s’est matérialisée par des réactions irréfléchies et l’adoption de lois antiterroristes qui menacent la liberté d’expression. Au Nigéria par exemple, l’enlèvement de 276 écolières par Boko Haram en avril était devenu emblématique et les forces de sécurité nigériane ont souvent répliqué  par des attaques brutales menées sans discrimination, des exécutions extrajudiciaires, des arrestations massives et arbitraires, des passages à tabac et des actes de torture.

Enfin, la réponse aux aspirations au changement exprimées pas des populations entières lors de manifestations pacifiques s’est matérialisée par une répression très souvent sanglante de manifestants, de journalistes, d’opposants politiques… Au Burkina Faso, les forces de défense ont utilisé des armes à feu, tuant une dizaine de personnes par balle. En Éthiopie, en Érythrée, au Rwanda… la liberté d’expression et de réunion a été bafouée par les autorités qui étaient pourtant sensées la protéger, la respecter et la mettre en œuvre. 


Face à la menace perpétuelle aux droits de populations entières dans toutes les parties du monde, Amnesty International souligne la nécessité d’un changement fondamental de méthode pour garantir la protection des civils dans les conflits armés et la liberté d’expression. Pour ce faire, l’organisation demande aux Etats de laisser tomber les beaux discours et de passer à l’action pour protéger les civils et ceux qui fuient les zones de conflits et les persécutions. Elle invite également les cinq membres du Conseil de Sécurité à renoncer à leur droit de véto dans les cas de génocide et d’atrocités massives, et prie tous les Etats de limiter l’utilisation des armes dans les zones peuplées et de prendre toutes les mesures nécessaires pour combattre l’impunité persistante…
 

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